Anna Dabrowski
Vancouver BC
Canada
J’ai reçu un diagnostic de leucémie myéloïde aiguë (LMA) le 28 septembre 2004. La saison de volley-ball avait commencé dans mon école secondaire, et les épreuves de sélection pour notre club de basket-ball se poursuivaient. Les exercices de lancer déposé m’essoufflaient beaucoup, mais j’attribuais cette difficulté à un manque d’entraînement. J’ai commencé à avoir de fortes fièvres durant la nuit, j’étais souvent étourdie et je me réveillais au bruit d’une tondeuse (même s’il n’y avait personne à l’extérieur qui tondait sa pelouse). La première fois que j’ai consulté un médecin, il m’a renvoyée chez moi en me disant que c’était la grippe. La deuxième fois, j’ai eu comme réponse : « C’est peut-être une mono. Retourne à la maison et repose-toi ». Enfin, ma mère a demandé une analyse sanguine et, quelques heures plus tard, ma famille a été convoquée à l’hôpital pour enfants.
J’avais 16 ans, et je venais tout juste de commencer la onzième année. J’adorais jouer au basket-ball, à tel point qu’immédiatement après l’annonce de la nouvelle par mon oncologue, je ne lui ai demandé qu’une seule chose : si je serais toujours capable de pratiquer ce sport. J’ai été admise à l’Hôpital pour enfants de l’Alberta et j’y suis restée pendant la majeure partie des huit mois suivants. Vu la nature aiguë de la LMA et son traitement énergique, je ne pouvais pas retourner à l’école cette année-là. J’avais à peine la force de sortir du lit, encore moins de devenir la première femme dans la NBA.
Personne dans ma famille immédiate n’était compatible avec moi, génétiquement parlant, pour procéder à une greffe de moelle osseuse. J’ai donc suivi quatre cycles de chimiothérapie. Cette période est floue – pas parce que les mois sont passés vite, mais parce que j’oscillais la plupart du temps entre la conscience et l’inconscience. J’étais très malade en raison de la chimiothérapie; parfois, je vomissais huit ou neuf fois par jour. J’ai perdu mes cheveux au cours du premier mois de traitement – un événement traumatisant pour une adolescente comme moi. Entre les cycles de chimiothérapie, quand mon taux de globules blancs atteignait un niveau acceptable, je pouvais enfin retourner chez moi. Ces moments agréables à la maison passaient en un coup de vent, car on m’avait ordonné de revenir à l’hôpital aussitôt que j’avais de la fièvre. Une réalité qu’on n’aborde pas souvent, c’est le fait qu’on n’a pas seulement peur de mourir du cancer – on a aussi peur de contracter des infections lorsque la chimiothérapie affaiblit le système immunitaire. Dès que le thermomètre indiquait la présence de fièvre, j’étais réadmise au service de cancérologie et soumise à des traitements antibiotiques pour combattre les infections. Ces traitements étaient souvent tout aussi douloureux, parfois pires, que la chimiothérapie. Outre la multitude de symptômes physiques, les effets sur la santé mentale et émotionnelle ont été importants. J’étais très chanceuse d’avoir le soutien de ma famille et de quelques bons amis, qui sont restés à mes côtés. Ma mère, la vraie superstar, dormait tous les soirs sur un lit pliant dans ma chambre. Même si j’étais fort reconnaissante de leur amour et de leur soutien, je me sentais très seule. Cette époque remontait à avant les médias sociaux et la convivialité de la messagerie directe – à moins qu’une personne ait fait l’effort de me rendre visite en personne (ce n’était souvent pas facile d’être dans la salle de quarantaine), j’étais privée de communications. Sans l’accès aux médias sociaux, à du soutien psychologique et à des programmes de soutien, je me sentais très isolée. J’avais un grand désir d’entrer en contact avec des gens qui vivaient les mêmes expériences que moi.
La période la plus difficile pour moi a été, sans aucun doute, ma vie immédiatement après le cancer. Lorsqu’on subit un traitement, on n’a qu’une seule priorité : survivre. Mais une fois qu’on retourne dans le monde « réel », le traumatisme, l’incertitude, l’anxiété et la crainte d’une récidive viennent assombrir tout ce qu’on fait pour apprendre à s’adapter à sa nouvelle vie. J’ai reçu mon diagnostic il y a presque 20 ans, et il m’a fallu plus de la moitié de ce temps pour guérir et bâtir des fondations solides. J’ai récemment écrit un article sur les habitudes que je conserve avec diligence pour m’aider à m’épanouir dans ma vie après le cancer : bouger (faire de l’exercice cinq ou six fois par semaine), pratiquer des techniques de pleine conscience (méditer régulièrement – j’aime bien l’application Waking Up) et se concentrer sur les gains modestes (s’améliorer peu à peu tous les jours). Par-dessus tout, je suis remplie de gratitude envers la vie qui m’a donné une seconde chance et que je ne tiens pas pour acquise.
Un peu plus d’un an après la fin du traitement, j’ai couru mon premier marathon complet avec Team in Training et j’ai amassé plus de 5 000 $ pour la SLLC. En tant que participante, je me suis sentie soutenue au sein d’une communauté de mentors et de participants qui avaient été touchés dans une certaine mesure par un cancer du sang. Captivée par la mission de la Société, j’ai ensuite couru un autre marathon complet ainsi qu’un demi-marathon, à la fois en tant que participante et mentore. Dans le même esprit, je me suis mise à participer régulièrement à la Marche Illumine la nuit. Suleika Jaoud, auteure ayant récemment figuré sur la liste des meilleurs vendeurs du New York Times, a écrit ses mémoires relatant son incroyable expérience de la LMA. Dans cet ouvrage, elle décrit l’importance des relations – « Le traumatisme a une façon de diviser notre vision du monde en deux groupes : ceux qui comprennent et ceux qui ne comprennent pas ». Bien que je n’aie pas pu saisir bon nombre de ces occasions communautaires durant le traitement, elles ont joué un rôle très important dans mon parcours vers la guérison, car elles m’ont permis d’entrer en contact avec bien des gens qui « comprenaient » ma situation.
Je savais que les fonds amassés serviraient à financer la recherche vitale sur les cancers du sang dans le monde, mais je ne comprenais pas à quel point ils pouvaient changer la vie des gens. J’ai récemment eu l’incroyable privilège d’assister à un événement de la SLLC animé par le Dr Lawrence Meyer. Lors de sa présentation, le Dr Meyer a abordé l’impact d’un traitement prometteur contre la LMA. Ce traitement, mis au point par son équipe, a été financé et approuvé avec l’aide de la SLL. J’étais émerveillée par le Dr Meyer et le travail qu’il avait accompli pour faire avancer le pronostic et donner de l’espoir aux gens à la suite d’un diagnostic de LMA. Mes autres initiatives liées aux programmes de subvention et aux projets de financement, en plus de l’espoir que suscite la SLLC, n’ont fait que renforcer mon implication dans cette communauté.